Arrivée de lucien leuwen à nancy
a. Adoption du point de vue de Lucien
La plus grande partie du texte s’apparente à la technique que l’on désigne par le terme de « focalisation interne » : le narrateur en sait autant mais pas plus que son personnage. Le début du passage précise nettement la règle du jeu : « Lucien leva les yeux et vit… ». Adoptant ce point de vue, le narrateur place dans une certaine mesure le lecteur dans une situation privilégiée : il faut être en effet sur un cheval pour apercevoir « un embarras sous une voûte au bout de la rue », et, à plus forte raison, pour pouvoir distinguer le détail de « la mousseline brodée » du rideau ou encore lire dans les yeux d’une inconnue « une expression singulière » surtout quand on sait qu’elle est « à demi-cachée » derrière une fenêtre refermée. Seuls l’arrêt de la colonne et la hauteur de la monture permettent ce point de vue. En adoptant ce regard, le narrateur contrarie aussi notre expérience car l’apparition de la jeune femme reste empreinte de tout son mystère. Nous ne savons qui elle est, nous ne faisons que l’entrevoir, et nous en sommes réduits, avec le narrateur et le témoin, à des conjectures : « était-ce de l’ironie, de la haine… ? »
b. Une touche de complicité
Cette dernière indication nous entraine un peu plus loin : non seulement nous voyons ce que voit le personnage mais nous suivons aussi ses pensées. En témoigne nettement le fragment de monologue intérieur qui clôt le premier paragraphe : « quel choix de couleur voyantes ont ces marauds de provinciaux ! » S’apparente à la même technique l’interrogation déjà citée de la fin du deuxième paragraphe où sont énumérées les hypothèses suscitées par l’ « expression singulière » des yeux de la femme. Ces ruminations que nous recevons « en direct » semblent d’ailleurs bénéficier de l’adhésion du narrateur qui s’accorde avec son héros pour décrier « la province ». Une mention comme « cette idée peu polie » trahit une évidente complicité entre le