etudes
33, 1, 2012
ANNA LEDWINA
REPRÉSENTATIONS DE L’HISTOIRE DANS LES TEXTES
DE MARGUERITE DURAS ET SIMONE DE BEAUVOIR
Quand on s’interroge sur le rapport entre littérature et histoire, on voit en effet le sujet foisonner se scinder. L’histoire, ce peut être l’Histoire « avec sa grande
Hache », comme le dira Georges Perec : la guerre, les camps, les « blocs », la décolonisation. Cela signifie aussi le rapport de la littérature à sa propre histoire : idées, auteurs et œuvres. C’est enfin le rapport avec le moment et les faits qu’il contient, la manière dont il s’inscrit dans le présent, ou s’en absente. L’écriture déploie ses propres enjeux qui sont liés avec le « moment historique » de chaque œuvre. Selon que la question historique s’impose sur la scène littéraire dans un pays où la littérature s’était détournée de l’Histoire ou dans un autre qui luttait pour construire la sienne, l’approche de cet enjeu ne sera pas la même. Dans chaque aire culturelle il est intéressant de distinguer un événement ou un bouleversement historiques qui ont le plus marqué la civilisation. En Occident, la Seconde Guerre mondiale, l’extermination du peuple juif de même que l’armement nucléaire sont décisifs.
À l’obsession de la mort, à l’angoisse engendrée par les holocaustes s’ajoutent des bouleversements économiques et politiques qui impliquent la révision des systèmes traditionnels. De nombreux écrivains se demandent comment s’exprimer « après Auschwitz », comment encore imaginer l’humanité après le génocide, s’il est possible d’écrire, de penser que l’écriture peut transformer notre vision du monde. Ce phénomène détermine bien des œuvres et des manières d’écrire (Viart,
2009), en obligeant à reconsidérer les thèmes séculaires de la littérature, en particulier ceux de l’Histoire, en tant que matériau et horizon imaginaire. Comme le constate Irma Garcia : « L’écriture dénonciatrice [...] du Deuxième Sexe, écriture politique, au sens où