Expliquer ses actes par l'inconscient, est-ce ruiner la morale
Le jugement est une des dimensions fondamentales de la morale. Or, celui-ci n'est possible que si la personne est considérée comme l'auteur responsable de ses actes. Dès lors, tout ce qui semble contester cette possibilité semble ruiner la morale. N'est-ce pas le cas justement des explications de notre conduite par le recours à l'inconscient ? Cette notion désigne des phénomènes psychiques qui se produisent en nous sans que notre volonté le décide. Il semble donc que nous soyons commandés de l'intérieur par des forces obscures. Cependant, cela revient à dire que notre comportement n'est pas réellement le nôtre. Cette affirmation est-elle logiquement cohérente ou relève-t-elle d'un désir de se mettre hors de cause pour ne pas assumer ce que nous faisons ? Il importe de déterminer les relations entre l'inconscient et les fondements de la morale.
1. Le sens moral de l'acte
A. Acte et Instinct
Comprendre la nature de l'acte demande que nous éclairions d'abord celle de l'action dont il est une dimension. Avant de réaliser quelque chose nous commençons par le stade du projet ou de l'intention. Nous formons la représentation d'un but à atteindre, puis nous passons à l'acte pour y parvenir. Cette attitude est même, selon Kant, le propre de l'homme, comparé aux animaux qui sont mus par l'instinct. Ce dernier terme désigne une conduite innée, inconsciente, qui pousse irrésistiblement l'animal vers ce qui lui est nécessaire.
À l'inverse, l'homme a la capacité de former des idées de ce qu'il désire et de réfléchir aux meilleurs moyens de l'atteindre. L'action est donc liée à la conscience, celle que l'homme prend de lui-même et de son environnement. Il est donc légitime de demander à quelqu'un d'expliquer la cause de ses actes. Il y répondra en faisant valoir ses mobiles et ses motifs. On dira par exemple que l'acte a été commandé par la colère dont l'objectif était de dénoncer une loi injuste. On pourra alors juger l'acte selon les intentions du sujet et les