La fontaine l'huitre et les plaideurs
I/ LA STRUCTURE DE LA FABLE
A/ Le récit et la moralité (= le corps et l'âme)
B/ Le rôle du discours
II/ UN SATIRE DE LA JUSTICE
A/ Le personnage de Perrin Dandin
B/ La justice : simulacre et réalité
III/ L'ESTHETIQUE IRONIQUE
A/ Le registre ironique
B/ Le statut ironique de l'Huître
C/ Les effets de renversement
Conclusion
voila la fable :
Un jour deux pèlerins sur le sable rencontrent
Une huître, que le flot y venait d'apporter:
Ils l'avalent des yeux, du doigt ils se la montrent;
A l'égard de la dent il fallut contester.
L'un se baissait déjà pour amasser la proie;
L'autre le pousse, et dit: « Il est bon de savoir
Qui de nous en aura la joie.
Celui qui le premier a pu l'apercevoir
En sera le gobeur ; l'autre le verra faire.
- Si par là l'on juge l'affaire,
Reprit son compagnon, j'ai l'œil bon, Dieu merci.
- Je ne l'ai pas mauvais aussi,
Dit l'autre; et je l'ai vue avant vous, sur ma vie.
- Eh bien! vous l'avez vue; et moi je l'ai sentie. »
Pendant tout ce bel incident,
Perrin Dandin arrive : ils le prennent pour juge.
Perrin, fort gravement, ouvre l'huître, et la gruge,
Nos deux messieurs le regardant.
Ce repas fait, il dit d'un ton de président:
« Tenez, la cour vous donne à chacun une écaille
Sans dépens, et qu'en paix chacun chez soi s'en aille. »
Mettez ce qu'il en coûte à plaider aujourd'hui;
Comptez ce qu'il en reste à beaucoup de familles,
Vous verrez que Perrin tire l'argent à lui,
Et ne laisse aux plaideurs que le sac et les quilles.
Jean de La Fontaine, Fable IX, Livre