Lancelot ou le chevalier à la charette
Le personnage de Lancelot incarne les contradictions de l’Amour courtois, à la fois à travers l’intensité du dilemme vécu et le risque de déchéance sociale. Tout d’abord, il est présenté une atmosphère où le chevalier est confronté au déshonneur. « Ils huent, petits et grands, et les vieillards et les enfants, par les rues, à grandes huées ; le chevalier entend sur lui bien des vilenies et des mépris» (l.151-153). Les mots huent, huées, vilenies et mépris forment un champ lexical qui exprime bien la honte et le déshonneur que le chevalier devrait ressentir en traversant la foule. Sur cette même pensée, une énumération des actes commis par des criminels devant embarquer dans la charrette renforce notre opinion face à l’indignité. «Tout comme les piloris, à ceux qui commettent des meurtres ou trahisons, aux vaincus en duel judiciaire, et aux larrons qui ont eu le bien d’autrui par larcin ou qui l’ont pris de force sur les chemins» (l.6-8). Par la suite, l’ampleur du dilemme du chevalier est accentuée par le récit de son débat intérieur. «Mais raison, qui d’Amour se sépare, lui dit qu’il se garde bien d’y montrer ; elle gourmande et lui enseigne de ne rien se faire ni entreprendre dont il ait honte ni reproche» (l.25-27). Cette citation aide à la compréhension de la complexité qu’oppose le dilemme du débat intérieur du chevalier en personnifiant ainsi deux aspects de son être entrant en confrontation. On comprend ainsi le choix difficile que fait face ce dernier. Bref, tant par des expressions qui évoquent le déshonneur et la vilenie que par un attrait plus métaphorique du choix ardu que doit prendre le chevalier face à l’amour qu’il ressent, cet extrait de roman courtois fait ressortir l’ampleur du dilemme vécu par Lancelot.