MOLIÈRE_amphytrion
Le Misanthrope
1. Situation du texte
Molière s’est attelé à l’écriture du Misanthrope dès 1664, alors que Tartuffe, sa grande comédie offensive contre le clan des dévots, venait d’être interdite. On peut mettre la gravité de cette nouvelle pièce sur le compte de son amertume et de sa lassitude. Avant d’achever ce texte, il a néanmoins eu l’énergie d’écrire Dom Juan et L’Amour médecin pour renflouer les caisses de son théâtre.
Une scène d’exposition doit apporter avec naturel les informations indispensables à la compréhension de l’intrigue et à l’identification des caractères. Dans Tartuffe, le spectateur se fait une idée du protagoniste grâce à l’opinion que les autres ont de lui (Tartuffe n’entre en scène que très tard). Ici, Molière a choisi de faire parler d’emblée son personnage pour qu’éclate au grand jour son caractère d’atrabilaire, d’autant mieux « typé » qu’il entre en contraste (d’où un effet comique) avec celui du mondain Philinte.
2. La satire de caractère
Le caractère du Misanthrope est ambivalent. D’une part on peut y voir un idéaliste, un défenseur acharné de la vertu propre à s’attirer l’admiration de tous. Son rigorisme moral se manifeste dans l’usage de verbes de volonté (voir l’anaphore en début de vers de « Je veux - v. 1, 29, 35-) et de jugement (« souffrir » – dans le sens de supporter –, « haïr »), et dans l’accumulation d’adjectifs dont la connotation péjorative est renforcée par l’antéposition au substantif (« cette lâche méthode », « inutiles paroles », « de vains compliments »). Molière lui prête un vers sentencieux (v. 24) pour illustrer sa soif d’absolu.
D’autre part, gardons à l’esprit qu’Alceste a été conçu par Molière comme un rôle comique : comme tous les « types », Alceste est en effet l’exemple d’une âme dont les plus belles qualités, développées à l’excès, se transforment en défauts. En l’opposant à Philinte qui sait rester modéré et se rendre agréable, Molière fait ressortir dès la première scène sa mauvaise humeur