Mémoire, identité, patrimoine
Mémoire, identité, patrimoine : l’exemple de France Télécom
Entretien avec Denis Varloot et Christian Chaunavel par Pascal Griset (Professeur, Directeur du Centre de Recherche en Histoire de l’Innovation, Université Paris-Sorbonne) et Léonard Laborie (ATER, Université Paris-Sorbonne)
Le musée des télécommunications est situé à Pleumeur-Bodou dans les Côtes d’Armor, sur le site de la station ayant réalisé la première transmission d’images de télévision entre les États-Unis et l’Europe. Le Radôme, enveloppe sphérique protégeant la gigantesque antenne-cornet utilisée il y a plus de quarante ans, est classé monument historique. Le 18 septembre 2004, les autorités préfectorales ont inauguré la plaque l’inscrivant comme « patrimoine du XXe siècle ». Denis Varloot, président de l’association qui gère cet établissement, et Christian Chaunavel, qui en est le directeur, abordent l’histoire de ce musée et les enseignements que l’on peut en tirer quant aux relations complexes existant entre une grande entreprise de réseau et son patrimoine historique.
P. Griset : Quelle est la spécificité de la dimension patrimoniale pour une entreprise de télécommunications comme France Télécom ? D. Varloot : L’aspect patrimonial semble primordial dans l’identité d’une entreprise de réseau. Si la possession d’un réseau irriguant la France entière est une charge extrêmement coûteuse, nous avions le sentiment à la Direction Générale des Télécommunications qu’en retour elle nous protégerait pour toujours de la concurrence. Nous le croyions très sincèrement ; nous ne pensions pas qu’il fût possible à quelqu’un d’autre de se mettre à créer un réseau parallèle à celui des Télécoms. Et pourtant, on s’aperçoit aujourd’hui que parce que la concurrence devient la loi internationale, on en vient à permettre à des entreprises qui sont les ennemis, par définition, de l’entreprise historique, d’entrer dans ses locaux, en quelque sorte de se brancher librement sur son réseau. Cela