BB Claudel Ponge Verhaeren
CORPUS DE TEXTES
Texte A. Le Porc, Paul Claudel, dans Connaissance de l’Est, 1896, Gallimard.
Texte B. Le pain, Francis Ponge, dans Le Parti pris des choses, 1942.
Texte C. Préambule au poème L’Œillet, Francis Ponge, dans La rage de l’expression, 1952.
Texte D. Les Horloges, Émile Verhaeren, dans Les Bords de la route, 1895.
Texte A. Le Porc, Paul Claudel, (1868 - 1955).
Je peindrai ici l’image du Porc.
C’est une bête solide et tout d’une pièce ; sans jointure et sans cou, ça fonce en avant comme un soc. Cahotant sur ses quatre jambons trapus, c’est une trompe en marche qui quête, et toute odeur qu’il sent, y appliquant son corps de pompe, il l’ingurgite. Que s’il a trouvé le trou qu’il faut, il s’y vautre avec énormité. Ce n’est point le frétillement du canard qui entre à l’eau, ce n’est point l’allégresse sociable du chien ; c’est une jouissance profonde, solitaire, consciente, intégrale.
Il renifle, il sirote, il déguste, et l’on ne sait s’il boit ou s’il mange ; tout rond, avec un petit tressaillement, il s’avance et s’enfonce au gras sein de la boue fraîche ; il grogne, il jouit jusque dans le recès1 de sa triperie, il cligne de l’œil. Amateur profond, bien que l’appareil toujours en action de son odorat ne laisse rien perdre, ses goûts ne vont point aux parfums passagers des fleurs ou de fruits frivoles ; en tout il cherche la nourriture ; il l’aime riche, puissante, mûrie, et son instinct l’attache à ces deux choses, fondamental : la terre, l’ordure.
Texte B. Le pain, Francis Ponge, dans Le Parti pris des choses, 1942.
Dans Le Parti pris des choses, Francis Ponge (1899 - 1988) porte sur les objets du quotidien un regard nouveau : d’utile et banal l’objet devient chef-d’œuvre poétique.
LE PAIN
La surface du pain est merveilleuse d’abord à cause de cette impression quasi panoramique qu’elle donne : comme si l’on avait à sa disposition sous la main les Alpes, Le Taurus2 ou la