Circé
Quelle importance et quelle signification accordez-vous à Circé dans les chants V à XIII de « L’Odyssée » ?
Texte fondateur s’il en est, L’Odyssée est également la référence absolue et incontournable du roman initiatique, de la force des images qu’elle véhicule et de l’empreinte qu’elle a laissée dans notre patrimoine. Des Chevaliers de la Table Ronde à Harry Potter en passant par Le Seigneur des Anneaux de J.R.R. Tolkien, l’œuvre d’Homère trouvent aujourd’hui encore des répercussions, et Ulysse mérite amplement d’être cité en premier par Joseph Campbell dans son Héros aux Mille Visages. Parmi tous les personnages et tous les archétypes qui y figurent, il est en un qui est constamment repris (avec parfois des variantes) : la sorcière, ou, dans le cas présent, Circé.
Présente dans les chants X et XII, il est difficile dans un premier temps de se forger une idée clairement définie de ses intentions, ne serait-ce que par son revirement brutal, qui peut paraître suspect pour certains : cette soudaine tendresse est-elle réelle ou n’est-ce qu’une feinte uniquement destinée à apaiser Ulysse et à ne pas être tuée ? Cherche-t-elle à endormir la vigilance de « l’homme aux mille tours » par son charme, de belles paroles et une apparente soumission en attendant le bon moment pour frapper (tactique en tout point identique à celle d’Ulysse lorsqu’il dut faire face à Polyphème) ; ou bien est-elle une alliée véritablement acquise à sa cause, à l’image d’Athéna ? Son rôle, d’abord équivoque, se précisera lorsqu’elle lui prodiguera des conseils qui se révéleront primordiaux pour la suite de son périple. Ainsi, elle recommande à Ulysse de descendre aux Enfers à la rencontre du devin Tirésias (ce qu’il fera au cours du chant XI), et elle le met en garde contre les dangers dont sa route est parsemée (c’est-à-dire les Sirènes, Charybde et Scylla, qui feront leur apparition dans la seconde moitié du chant XII). Après l’occasion gâchée que représente Éole, et les