Commentaire de texte: julie ou la nouvelle héloise, sixième partie, lettre viii, de mme de wolmar à saint-preux, rousseau
1653 mots
7 pages
De nos jours, qualifier une personne comme étant heureuse signifie qu’elle a ce qu’elle désire. Or, cette conception du bonheur n’est point moderne. Depuis l’antiquité, il existe des philosophies hédonistes qui nous invitent à rechercher le plaisir, à obtenir ce que nous désirons afin d’être heureux. Calliclès, par exemple, nous dit dans le Gorgias de Platon que l’homme qui ne cherche pas à satisfaire ses désirs mène « une vie de pierre ». De plus, Épicure nous enseignait qu’en apprenant à nous contenter de plaisirs simples, nous pouvons trouver l’ataraxie, ou l’absence de trouble, et ne pas souffrir du manque. Ainsi, le bonheur vient du fait que l’on doit apprendre à combler ses désirs : la fin du désir est le commencement de la vie heureuse. Cependant, le sens même du mot « désir » semble indiquer qu’il ne peut jamais être complètement comblé, le propre du désir étant de renaître perpétuellement, de sorte que la question se pose de savoir si le bonheur implique une amplification de nos désirs ou plutôt leur réduction. Le texte de Rousseau, extrait de Julie ou la nouvelle Héloïse (1761), repose ainsi cette question classique du rapport entre désir et bonheur pour nous affirmer paradoxalement que le bonheur résulte du désir lui-même, et non pas de sa satisfaction, ce qui met fin au désir et donc également au plaisir. Le problème du texte est par conséquent de savoir si le bonheur provient de l’art de mettre fin à son désir (ascétisme), ou bien si le bonheur se trouve plutôt dans l’art même de désirer, de renouveler sans cesse ses désirs (hédonisme).
Il est vrai que désirer est en quelque sorte avoir l’âme troublée par une insatisfaction, un manque qui est nécessairement à la racine du désir et qui engendre une certaine forme de peine. On peut voir alors le désir comme la source de bien des maux. Afin de résoudre ce problème, certains pensent qu’il faut modérer ses désirs et apprendre à ne désirer que ce que nous pouvons obtenir facilement. Épicure, dans sa Lettre