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page 5 Guyette Lyr et la voix des « sans parole »
A l’épreuve du terrain
Le théoricien du «bouc émissaire» confronte son modèle aux enquêtes des anthropologues
René Girard
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raduite et commentée aux quatre coins du monde, l’œuvre de René Girard s’est bâtie sous le signe du scandale. Au fil des textes, depuis Mensonge romantique et vérité romanesque (1961) jusqu’à Je vois Satan tomber comme l’éclair (1999), le théoricien du « désir mimétique » a trempé sa plume à l’encredupamphlet.Lesphénomènes que je révèle, dit-il en substance,jesuis lepremier àlesavoirrepérés ; eux seuls éclairent la violence qui fonde nos sociétés depuis l’origine; pourtant, ces vérités, personne n’en veut ! Ainsi, à la fois savant et prédicateur, le professeur de Stanford
(Etats-Unis) accomplit deux gestes simultanés:d’unmêmeélan,ilproclame la portée révolutionnaire de sontravailetsegausse desrésistances auxquelles il se heurte parmi ses contemporains, notamment à l’université. De fait, cet anthropologue d’un genre particulier en agace plus d’un,luiquisembleavoirréponse à tout et dont les textes sont censés expliquer des réalités aussi diverses que les sacrifices aztèques, le snobisme proustien ou les attentats islamistes. Lui qui transgresse les frontières disciplinaires, mêlant psychanalyse, littérature et théologie. Lui qui présente son entreprisecomme une apologie du christianisme. Lui qui, enfin, affir-
mesansambagequesathéories’appuie sur le simple bon sens… « Je n’arrive pas à éviter de donner cette impression d’arrogance », admettait-il, un brin narquois, lors d’un entretien réalisé en 2007. A cette arrogance réelle ou supposée, les « chers collègues » de Girardontréponduparuneindifférence polie, voire par un silence de plomb. D’où ce paradoxe : alors qu’il inscrit explicitement ses enquêtes dans leur discipline, les anthropologues ont rarement examiné ses hypothèses. Une telle confrontation n’a vraiment eu lieu qu’une