Le peintre de la vie moderne - baudelaire, goncourt, huysmans
BAUDELAIRE, « Le peintre de la vie moderne », in Ecrits sur l’art, Livre de Poche Classiques, 1992 et 1996 [1863].
GONCOURT, Manette Salomon, Ch. CIII, CXV, CVI, Paris : Folio, 1996 [1867].
HUYSMANS, « L’exposition des indépendants en 1880 », pp. 130-142, in Œuvres complètes, t. IV : L’art moderne, Paris : Cris et Cie, 1929.
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Degas Edgar, Aux Ambassadeurs : Mlle Bécat, 1885, Pastels sur lithographie, 22,8 x 20 cm, M. et Mme Eugene V. Thaw, New York.
Si la modernité est une notion relativement jeune – c’est au XIXème siècle que l’on voit son avènement se produire-, le terme de « moderne », lui, date davantage. Dans un premier temps, il convient donc de mesurer l’écart creusé entre ces deux mots par un simple suffixe. Le moderne – souligne Compagnon[1] – s’utilise dès le Ve siècle par opposition à l’antique, sans pour autant faire état de ce qui est nouveau. Dans une conception chrétienne du temps – cyclique ou typologique, suivant l’époque - la nouveauté ne peut être vue comme une progression : le clerc se doit de répéter les modèles anciens. La modernité, par contre, est opposition et conscience d’une rupture : dans notre conception actuelle du temps, à mesure que le temps coule, ce qui est moderne, cesse de l’être et fait place à une nouvelle modernité. Il apparaît ainsi qu’une conception cyclique du temps va céder sa place à une conception linéaire, ouvrant sur un temps infini. C’est grâce à ce changement que les notions de progrès et de décadence vont pouvoir se faire une place, modulant la nouvelle conception de modernité.
Comme le souligne Etienne Souriau dans son Vocabulaire d’esthétique[2], il est important de mesurer à quel point cette notion contient une connotation affective : soit on est pour la modernité et on parle alors de progrès, soit on est contre et on parle de décadence, de « malaise moderne ». La modernité n’est pas une notion neutre ; elle nous demande de