Marivaux
Ce serait pratiquer un finalisme rétrospectif assez aventureux, que de prétendre que le Jeu de l'Amour et du Hasard vient à son heure couronner dix ans d'alliance heureuse avec le théâtre. Après un parcours sans faute de 1720 à 1725 (d'Arlequin poli par l'amour à l' Île des esclaves), Marivaux éprouve quelques déboires: le Dénouement imprévu (un acte, 1724) et l' Île de la raison (trois actes, 1727) ne s'imposent pas à la Comédie-Française, non plus que la Nouvelle Colonie ou la Ligue des femmes (trois actes perdus, 1729) chez les Italiens; l'Héritier de village (un acte, 1725) et le Triomphe de Plutus (un acte, 1728) réussissent assez bien sur la scène italienne, mais sa seule vraie grande pièce, durant ces années, reste la Seconde Surprise de l'amour (trois actes, 1727), présentée au Français où elle reçut un accueil réservé. Même s'il est vrai que Marivaux s'était beaucoup donné au roman (la Vie de Marianne) et aux Journaux, le moment était sans doute venu pour lui d'une grande pièce et d'un beau succès chez ses chers Italiens.
On se doute que le Jeu a mobilisé la laborieuse confrérie des sourciers; on trouvera la synthèse de leurs filatures dans l'édition du Théâtre complet par F. Deloffre. On devrait, selon lui, conclure de ce vaste voyage commencé à Athènes, chez Aristophane, que "la véritable source" est à chercher, "quoi qu'on en ait dit", dans les Amants déguisés, comédie d'Aunillon, jouée en... février 1729 à la Comédie-Française. Voilà en effet qui, à défaut de vraiment éclairer la pièce, vérifie l'esthétique d'un partisan déclaré des