Le piege du credit impot recherche
Par Philippe Askenazy
Le budget de la recherche - en discussion devant le Parlement - affiche une forte progression. Cette présentation a le don d'exaspérer le monde de la recherche publique. Certes, les carrières sont globalement revalorisées, mais l'essentiel de cette hausse est à nouveau dû au crédit d'impôt recherche (CIR), une subvention versée aux entreprises privées qui effectuent des dépenses de recherche et développement (R&D). En revanche, le soutien aux institutions publiques ne progresse guère.
Doit-on pour autant attaquer le CIR ? Après tout, la recherche privée, comme publique, est un moteur de la croissance économique, et le fait de stimuler le secteur privé est, dans ce cadre, légitime pour l'Etat. Il convient donc d'examiner précisément le dispositif actuel.
Malgré l'existence d'un CIR, institué dès 1983, l'effort en R&D des entreprises en part de la richesse nationale stagnait, voire régressait depuis le milieu des années 1990. Inversement, il a nettement progressé en Allemagne, qui n'a pourtant pas de CIR ! D'où l'idée d'un changement profond du mode de calcul de ce crédit d'impôt : au lieu de prendre en compte la croissance des dépenses, c'est désormais leur niveau qui permet d'obtenir un chèque de l'Etat. Celui-ci atteint 30 % des sommes engagées (60 % si l'entreprise sous-traite à un laboratoire public). Ce changement de base de calcul et le déplafonnement du crédit ont fait littéralement exploser le coût du CIR : 0,9 milliard d'euros en 2004, 1,7 milliard en 2007, bien au-delà de 2 milliards prévus pour 2010. Avec les avances prévues par le plan de relance, c'est dix fois le budget consolidé de la plus riche université française (Paris-VI) qui serait versé aux entreprises.
Peut-on en espérer un impact significatif sur le comportement des entreprises, notamment des plus grandes, qui bénéficient à plein des nouveaux modes de calculs ? Les évaluations économétriques de l'impact du CIR en France