Quinte-curce, les barbares
Introduction (7 min)
L'œuvre majeure de Quinte-Curce nous est parvenue sous la forme d'une geste : la conquête d'Alexandre des territoires perse et mésopotamien. Les livres VIII à X qui constituent notre corpus se situent après la victoire du Granique, la victoire d'Alexandre sur les Grecs étant alors acquise. Ils se concentrent précisément sur la découverte de peuples inconnus et leur soumission progressive, de gré ou de force. Il est alors évident que l'étranger prend une part centrale dans ce récit, sous la forme particulièrement signifiante dans l'Antiquité du barbare.
Barbare — et le concept de barbarie qui lui est attaché — ont, depuis les Grecs, eu une connotation péjorative. Ils peuvent traduire à la fois le mépris pour l’autre, l’étranger, ainsi que la crainte qu’il inspire. Au fil de l’histoire, le terme a revêtu différentes acceptions. À l’origine, le terme barbare était un mot utilisé par les anciens Grecs pour désigner d’autres peuples n’appartenant pas à leur civilisation, dont ils ne parvenaient pas à comprendre la langue. Bárbaros n’a à l’origine, aucune nuance péjorative, il signifie simplement « non grec » ou plus largement toute personne dont les Grecs ne comprennent pas la langue, quelqu’un qui s’exprime par onomatopées : « bar-bar ». Il s’agissait donc au départ d’un simple critère linguistique permettant de distinguer les individus dont le langage leur apparaissait comme un babil inintelligible. Par extension, cette différence linguistique donnera une vision négative, méprisante, de l’autre, de l’étranger, qui se retrouvera dans la définition transmise par les Grecs au monde romain. Après la conquête de la Grèce, les Romains adoptèrent le terme grec et l’utilisèrent pour désigner les peuples qui entouraient leur propre monde. Était donc qualifié de barbare à Rome celui qui n’appartenait pas à la sphère culturelle gréco-romaine, quel que fût son niveau de